Face à la montée en puissance de l’économie numérique et des entreprises liées à ce secteur, la question se pose de l’impact de cette révolution sur les territoires urbains. On retrouvera ci-dessous la synthèse des principaux enseignements de la conférence annuelle de la chaire dédiée à « La ville face au numérique ».
Loin d’être épargnée par le tsunami numérique, la ville est face à un enjeu central : faire en sorte que ce changement de paradigme se traduise en termes d’opportunités. L’émergence de lieux dévolus aux entreprises numériques dans les grandes agglomérations, voire de véritables Silicon Valleys à l’européenne, ainsi que la multiplication des tiers-lieux en sont des illustrations.
Cette polarisation des activités et de la valeur liées au numérique dans les grands centres urbains met en exergue non seulement des enjeux en termes d’aménagement du territoire mais aussi crée de nouvelles problématiques pour les acteurs de l’immobilier. Comment favoriser l’émergence de véritables Silicon Valleys et dans quelle mesure le modèle californien est-il reproductible ? Quelle place pour les géants du numérique dans ce nouveau tissu économique ? Quelle analyse de cette révolution par les grands acteurs de l’immobilier, qu’ils soient utilisateurs, investisseurs ou promoteurs ?
On retiendra à l’issue de cette table ronde quelques éléments clés :
- Idriss Aberkane (chercheur à Polytechnique, ambassadeur de l’Unitwin à l’Unesco) : Le point de vue du chercheur, spécialiste du numériqueL’analyse historique des Silicon Valley montre une commune particularité : elles ont toujours cherché à relier la ville et l’espace et ont toujours été des melting pots. Il ne faudrait donc surtout pas chercher à détacher le rêve du pragmatisme.Par ailleurs, comme souligné par Steve Jobs lors d’une ITW avec François Mitterand, la principale raison de l’absence de Silicon valley en France est culturelle : la prise de risque n’est pas encouragée en France, ni à l’école, ni en entreprise. Il ne s’agit pas seulement d’une question de murs, mais également d’esprit : le software est tout aussi important que le hardware.En région parisienne, la « Y Valley » pourrait être Silicon Valley à la Française : toutes ces villes en Y qui sont autour de Paris : Cergy, Velizy, Orsay, Massy où il y a une grande concentration de centres d’excellence. Enfin, les campus universitaires devraient être conçus à l’image des campus anglo-saxons, favorisant la sérendipité, avec une architecture audacieuse et inspirante, le campus étant par définition le bâtiment le plus connecté au futur.
- Laurence Lafont (Membre du comex Microsoft France) : le point de vue d’un acteur majeur du numérique Toutes les entreprises doivent avoir des réflexions sur la transformation numérique en raison de l’uberisation qui vient disrupter tous les secteurs. Satya Nadella CEO de Microsoft a rappelé la mission de Microsoft : Faire en sorte que chaque individu ou organisation puisse réaliser son potentiel. Cette mission est mise en œuvre par 3 piliers :> Réinventer la productivité et les processus métiers.> Mettre en place et créer des infrastructures intelligentes.
> Créer un environnement numérique personnel
La notion d’écosystème est donc importante, avec la nécessité de créer des espaces d’open innovation qui permettent de faire travailler ensemble tous les acteurs de l’écosystème.
Les villes commencent à embrasser dans leurs réflexions pour l’aménagement du territoire cette logique d’écosystème ouvert, pour être au plus près des préoccupations des occupants. Les entreprises réfléchissent de plus en plus à la création d’e-lab, espaces d’innovations, ce qui impacte l’architecture et l’aménagement des bâtiments.Mettre en relation ces startups et les grandes entreprises a une vraie valeur. start-ups qui peuvent amener de l’innovation par rapport aux problématiques et enjeux de la grande entreprise.
- Stephan de Faÿ (DG de l’EPA Bordeaux-Euratlantique) : Le point de vue d’un acteur territorial de l’économie numériqueVille énergique et optimiste mais aussi technologique, Bordeaux verra son territoire se transformer avec l’arrivée de la LGV en 2017. Au sein du secteur Bordeaux-Euratlantique, la Cité Numérique est un produit immobilier inhabituel, abandonnant la démarche top-down classique mais aussi le financement massivement public. Le risque inhérent à ce projet est porté par l’EPA, qui à terme le cèdera à un acteur privé, mieux à même de garantir sa pérennité.Occupant un ancien tri postal aux trames atypiques, la Cité Numérique représente 26 000 m2 dédiés aux entreprises du numérique, dont 18 000 sont déjà pré-commercialisés, et ce avec une politique de communication réduite au minimum, portée essentiellement par les réseaux sociaux (twitter). Le modèle, repose sur une démarche collaborative en amont pour que le produit final réponde aux attentes spécifiques des acteurs du numérique (data center inutile, absence de premier jour pratique quand on travaille devant des écrans).Les entreprises du numérique y trouveront de la flexibilité physique et juridique, une vaste gamme de services sur-mesure par rapport à leur culture, des loyers compétitifs pour être compatibles avec leurs modèles économiques encore fragiles.